• TEILLAGE D'HIER

     

    Broie Chanvre-habitat bio 2017

        Broie ancienne (pour lin ou chanvre)  du pays de Pipriac (35). Les lames sont en bois. Elles sont galbées et soigneusement affutées (sans doute étaient-elles régulièrement limées) afin d'offrir un certain tranchant. La structure est légère, gracile, plus encore si on la compare à d'autres "broyes" ou "braies"...

     

        Divers modèles de broies de Bretagne et d'ailleurs (Tarn-et-Garonne). L'une est extraite de la fameuse Encyclopédie de Diderot et d'Alembert (1772), décrivant un usage autour de 1750.

    Sources : http://moulin.chauffour.free.fr/ca_poussait_chez_nous_autrefois/le_chanvre_aux_environs_de_1750.htm, http://croisesdelettres.over-blog.com/article-du-chanvre-aux-voiles-66576996.html & http://patrimoines.midipyrenees.fr/index.php?id=382&L=0&ill=19768200222V&emet=IVR73&tx_patrimoinesearch_pi2%5Bstate%5D=detail_avancee&tx_patrimoinesearch_pi2%5Bniveau_detail%5D=N3&RechercheId=

       Les livres sur les métiers anciens ne manquent pas. Ils permettent d'imaginer plus concrètement des techniques et des gestes en cours d'oubli. C'est le cas de Métiers et savoir-faire de toujours, écrit par Marius GIBELIN (2005, édition De Borée). Dans la rubrique "Le tisserand, on lit :

       "Le linge de maison, draps, chemises, blouses, sacs et cordes étaient fabriqués à partir du chanvre cultivé près de la ferme.

       Le semis s'effectue au printemps. Les pieds mâles qui portent des fleurs en grappe contenant du pollen sont arrachées en juillet. Les pieds femelles dont leurs fleurs en épi donnent les graines sont arrachées en septembre.

       La tige mâle ou femelle est creuse et recouverte d'une écorce fibreuse. C'est cette fibre qui est exploitée.

     

       Tige de chanvre pour partie écorcée, dégageant clairement moelle au centre (chènevotte) et fibres (filasse) au pourtour. Source : http://data.abuledu.org/wp/?LOM=23480

     

      Le chanvre arraché est mis en bottes et égrené (l'huile des graines servira à la fabrication de savons mous). Les bottes sont mises à tremper directement dans la rivière ou dans un rouissoir (mare ou étang) pour 4 ou 5 semaines. Cette immersion prolongée facilite la séparation  des fibres composant la tige en dissolvant par fermentation la colle qui les soude.

       Après séchage, on brise les tiges du chanvre : c'est le tillage ou teillage, qui consiste à séparer les fibres de la chènevotte.

       Il peut s'effectuer à la main ou à l'aide d'une broie.

       Cet appareil est composé d'un chevalet fixe, le "châssis", et d'une partie mobile, la "mâchoire", tranchante lorsqu'elle pénètre  dans le châssis.

       Le teillage à la main donne une filasse plus propre et plus solide mais plus difficile à filer.

      Au début du XXe siècle, le tisserand du village est spécialisé dans le tissage.  A la tête d'un métier, il lui arrive de se déplacer avec sa machine et d'aller dans certaines demeures où l'attend une importante commande. Dès lors membre à part entière de la maison, il travaille sur place à la confection du linge et des vêtements de toute la famille. (...)" (page 88)

     

       Nota : A deux, c'est plus sympathique et... deux fois plus rapide. Une photographie du livre montre une double broie... Deux femmes s'activent et prennent la pose, tandis qu'un homme semble carder des tiges, tout près. La carte postale suivante montre curieusement, et en plus réaliste (moins apprêtée) une situation similaire :

     

        Dans le Lot. Source : http://www.belcaire-pyrenees.com/article-retour-a-la-culture-du-chanvre-en-pays-de-sault-pourquoi-pas-59907848.html

     

     

       Outre l'usage domestique courant pratiqué partout en France comme décrit, les gens de Bretagne ont fabriqué dans le passé des toiles de chanvre et de lin qui ont atteint une réputation très large, avec une économie particulièrement florissante jusqu'après la période ducale. La région entière, dotée de ports et rias adaptés, d'une flotte, de marins et d'armateurs avisés, s'en est assez considérablement enrichie (les pays côtiers surtout). Du "petit Pérou" d'Europe ! D''originales demeures (les maisons à pondalez à Morlaix ou celles des judoled dans le Léon par exemple) en sont nées, les célèbres enclos paroissiaux, - exceptionnels, on l'oublie, y ont trouvé leurs mécènes - quittes à négliger d'autres investissements (matériellement... plus rentables).

     

       Voir aussi  : La Route des toiles en Bretagne, Le lin et le chanvre hier et aujourd'hui, Ouest-France, 2010.

     

        Entrée de l'enclos paroissial de Guimillau (29). Source : http://historic.free.fr/bretagne_enclos/ep_guimillau.html

     

       Nota : Le teillage est l'opération de séparation des fibres. Le broyage le prépare en cassant la partie résistante et ligneuse de la tige, c'est-à-dire les faisceaux de fibres périphériques (liber). Le cardage sera la dernière opération avec un peigne (ou pointe à chanvre) puis une carde à main.

     

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